lundi 1 janvier 2018

Avec le temps ...


En ce 1er janvier 2018, nous allons nous intéresser au temps, non pas celui qu'il fait (quoique la tempête Carmen eût pu justifier qu'on en parlât), mais celui qui passe – généralement trop vite à notre goût.

S'il fallait retenir une citation pour illustrer la dimension relative temps qui passe, je retiendrais celle de Paul Bourget dans "Le sens de la mort" : "Quand on attend, les secondes sont des années, et quand on se souvient, les années sont des secondes." Le temps est omniprésent dans notre imaginaire collectif et l'on ne compte plus le nombre d'artistes, d'écrivains, de poètes qui en ont fait un thème majeur de leur œuvre. On songe aux Montres molles de Salvador Dali, aux chansons Avec le temps de Léo Ferré, Je n'aurai pas le temps de Michel Fugain ou encore Le temps de Charles Aznavour. Mais comment ne pas citer l'intemporel À la recherche du temps perdu de Marcel Proust ou les Considérations intempestives de Friedrich Nietzsche !

Dès lors, rien d'étonnant à ce que le concept de temps se retrouve sous les formes les plus diverses dans la langue française. Quand deux personnes se retrouvent après un certain temps, il n'est pas rare que l'une déclare : "cela fait un bail" qu'on ne s'est pas vu. Comme on sait, un bail est un contrat de location, de durée très variable. Certains baux – dits emphytéotiques – peuvent porter sur des durées très longues, jusqu'à 99 ans, d'où l'idée de longue durée lorsque cela fait un bail qu'on est resté sans nouvelles de quelqu'un. Mais on entend parfois aussi dire cela fait une paye. Cette expression résulte sans doute d'une déformation de la précédente ; mais elle fait également référence à l'intervalle entre deux payes, de nos jours généralement un mois.

Quid des lustres ? "Cela fait des lustres que je ne t'ai pas vu". Au 17ème siècle, le lustre désigne une période de cinq ans. Mais pourquoi donc ? L'explication est à chercher dans l'antiquité romaine où le lustre désignait un sacrifice ou une cérémonie purificatrice (cf. lustration) qui avait lieu tous les cinq ans lors du recensement de la population. De nos jours un lustre désigne une période relativement longue.

Lorsqu'un pilote se targue de compter un grand nombre d'heures de vol, il fait valoir son expérience et, par conséquent, la sécurité qu'il apporte à ses passagers. En revanche, dans tout autre contexte que celui de l'aviation, si l'on on dit d'une personne qu'elle a des heures de vol, le propos est tout sauf élogieux. Il est vrai que notre société privilégie grandement la jeunesse. Corneille n'écrivait-il pas déjà dans Le Cid "Je suis jeune, il est vrai, mais aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années" ? Lesquelles années se disent, en argot, piges, balais ou berges. Pour en revenir aux heures, celles-ci deviennent des plombes en argot, sans doute par référence au marteau qui tombe d'aplomb sur la cloche pour sonner les heures, d'où plomber au sens de frapper et finalement de sonner.

Il est souvent insupportable d'attendre ou, plus familièrement, de faire le poireau ou encore poireauter. L'image du poireau, planté bien droit et immobile, est à l'origine de cette expression. C'est ce qu'il vous arrive quand vous restez planté quelque part. Et l'on retrouve ici l'origine du terme planton, cette sentinelle qui reste plantée à attendre des ordres. Il n'est pas sûr, en revanche, que l'expression faire lanterner quelqu'un fasse référence à l'immobilité verticale d'un lampadaire.

Si, ami lecteur, amie lectrice, vous me prenez en défaut sur telle ou telle interprétation, je vous répondrai au temps pour moi à moins que je ne déclare autant pour moi. Cette expression avec ces deux graphies mériterait un billet à part entière, tant il y de controverses à ce sujet. Nous nous contenterons d'indiquer qu'au temps, en langage militaire, est un ordre destiné à faire reprendre un mouvement depuis le début, au temps pour moi signifiant dès lors qu'on reconnaît son erreur et qu'on est prêt à revoir sa position, à revenir en arrière. Mais la graphie autant pour moi a également ses partisans : mon interlocuteur a commis des erreurs, mais je n'en suis pas non plus exempt, autrement dit il y en a autant pour moi.

Chers amis de ce blog, à l'aube de cette nouvelle année, je vous souhaite des temps heureux et le moins possible de contretemps !

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